20- LE TESTAMENT DE RAMPA
Potentiel humain
Imagination
(©1984. Stanké-Arnaud Immelé => pages 70 à 80 Extrait 12)

    N'allons pas évoquer les vieilles maîtresses, ni les vieux maîtres, mais cet exemple nous a paru bon parce que, dans cette leçon, nous allons parler justement d'un mot dont la signification a changé au fil des ans. Il s'agit de l'« imagination ».

    Ce terme est singulièrement tombé en disgrâce. Jadis, un homme imaginatif était un être sensible, un créateur, un homme capable d'écrire, de composer des vers ou de la musique. En fait, il était essentiel, pour l'honnête homme, d'être doué d'imagination. Aujourd'hui, il semble que ce mot s'applique plutôt à la malheureuse femme frustrée, qui se « fait des idées » et qui est au bord de la dépression nerveuse. Les gens ont tendance à écarter des expériences — qu'ils feraient mieux d'étudier! — avec un haussement  d'épaules   et  une   exclamation:

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« C'est de l'imagination! Ne sois pas stupide! » L'imagination, donc, est un mot qui aujourd'hui n'a pas bonne réputation, mais l'imagination contrôlée est la clef capable d'ouvrir l'esprit, de faire comprendre bien des choses voilées de mystère. Il est bon de se rappeler de temps en temps que, dans une lutte entre l'imagination   et  la   volonté,   c'est   toujours l'imagination qui  remporte la victoire. Les gens se targuent de leur volonté, de leur courage indomptable,  du fait que rien ne les effraie. Ils accablent d'ennui leurs interlocuteurs, en leur répétant sans cesse que leur volonté  leur permet  d'accomplir n'importe quoi. En réalité, leur volonté est impuissante tant que leur imagination ne la soutient pas. Ceux-là se sont laissé persuader par leur imagination  que  la  volonté  est  indispensable. Nous répétons, et toute autorité compétente sera d'accord avec nous, que la volonté n'est rien sans l'imagination. Il n'y a pas de force plus grande.

    Persistez-vous à croire malgré tout que la force de votre volonté vous permettra de faire des choses que refuse votre imagination? Posons un problème hypothétique, puisque c'est la mode!

    Nous avons devant nous une rue déserte. Il n'y a pas de voitures, pas de badauds, la chaussée est à nous. Traçons à la peinture un chemin de un mètre de large d'un trottoir à un autre. Sans avoir à vous soucier des voitures ni des curieux, vous descendez tranquillement du trottoir et vous traversez la chaussée entre

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les deux lignes peintes, vous n'avez pas un instant d'hésitation, votre cœur ne bat pas plus vite.

    Vous pouvez traverser entre ces lignes sans crainte parce que vous savez que la terre ne va pas s'ouvrir sous vos pas, vous savez qu'aucune voiture ne va vous écraser, vous savez que vous ne risquez absolument rien et, si par hasard vous trébuchez, vous ne tomberez jamais que de votre hauteur.

    Changeons maintenant le décor. La rue est la même, nous la traversons et nous montons au vingtième étage de l'immeuble d'en face, au toit en terrasse. De là, nous regardons de l'autre côté de la rue et nous constatons que nous sommes à niveau d'une autre terrasse, située juste en face. Si nous nous penchons au-dessus du parapet, nous pouvons voir sur la chaussée nos deux lignes peintes. Bien. Maintenant nous allons nous procurer une longue planche, large d'un mètre, de la largeur exacte du chemin que nous avons tracé par terre. Nous l'étendons en travers de la rue pour l'appuyer sur le parapet d'en face, à vingt étages du trottoir. Nous l'assujettirons aussi solidement que possible, nous nous assurerons qu'elle est bien lisse, qu'aucune bosse ne peut nous faire trébucher.

    Nous avons donc un chemin de la même largeur que celui de la chaussée. Pouvez-vous marcher sur cette planche solidement fixée à 60 ou 70 mètres du sol et traverser sans encombre pour atteindre le toit d'en face ? Si votre imagination vous dit que vous le pouvez, alors

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vous marcherez tranquillement sur cette planche et vous arriverez en face sans ennuis. Mais si votre imagination n'est pas aussi complaisante, votre cœur battra follement à la seule pensée d'accomplir cet exploit, votre estomac se crispera, vous serez livide de peur. Mais pourquoi? Vous avez déjà traversé la rue, alors pourquoi ne pouvez-vous la franchir en marchant sur cette planche solidement arrimée? La réponse est simple; votre imagination fait des siennes, votre imagination vous crie qu'il y a du danger, que si jamais vous perdez l'équilibre, si vous glissez, vous tomberez et vous vous tuerez. On a beau tenter de vous rassurer, rien n'y fait car votre imagination est plus forte que votre volonté. Si vous tenez néanmoins à prouver la force de cette volonté, vos nerfs céderont, vous vous mettrez à trembler, vous pâlirez et votre respiration deviendra désordonnée.

    Nous possédons en nous certains mécanismes qui nous préviennent et nous protègent du danger, des systèmes de sauvegarde automatiques qui retiennent l'être humain normal au moment où il voudrait prendre un risque stupide. L'imagination fait qu'il est impossible pour une personne de marcher sur cette planche, et aucun raisonnement ne pourra la persuader qu'elle ne risque rien, qu'il suffit d'imaginer qu'on peut le faire. Tant que vous ne vous   « imaginerez »   pas   debout   sur   cette planche, marchant paisiblement et sans crainte vers l'autre toit, vous n'y parviendrez pas.

    Si l'on fait appel à sa volonté, si on se force à faire une chose que réprouve l'ima-

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gination, on risque fort une dépression nerveuse, car, nous le répétons, en cas de lutte entre l'imagination et la volonté, c'est toujours la première qui remporte la victoire. Si l'on se force à faire quelque chose alors que toutes les sonneries d'alarme retentissent en nous, nos nerfs n'y résisteront pas, pas plus que notre santé.

    Certaines personnes sont terrifiées d'avoir à longer un cimetière à minuit. Si elles y sont obligées, elles sentent leurs cheveux « se dresser sur leur tête », elles ont les mains moites, toutes les perceptions sont aiguisées, chaque impression exagérée, et elles deviennent capables de faire un bond prodigieux dépassant leurs   possibilités   normales   si   jamais   elles croient voir un fantôme.

    Les personnes qui n'aiment pas leur travail doivent se forcer, ce qui produit souvent un mécanisme d'évasion. Certains de ces phénomènes provoquent parfois d'étranges résultats, mais c'est un mal pour un bien car ce sont des avertissements; si l'on n'en tient pas compte, la dépression nerveuse ou même l'aliénation mentale   n'est  pas   loin.  Nous   allons   vous raconter une histoire vraie; nous avons personnellement connu les faits, nous connaissions l'homme et nous savons quels ont été les résultats de ce cas.

    Cet homme était comptable et travaillait debout toute la journée parce que son travail l'exigeait et ne pouvait se faire assis. C'était un excellent comptable, il avait le don des chiffres mais il souffrait d'une phobie; il
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vivait dans la terreur de faire un jour une erreur de calcul,  et peut-être même d'être accusé d'avoir falsifié les  comptes  afin de voler ses patrons. En réalité, il était d'une honnêteté scrupuleuse, c'était un de ces individus de plus en plus rares qui n'emportent jamais  une  pochette  d'allumettes   dans  un hôtel, ni même le journal oublié par un voyageur sur une banquette. Malgré tout, il avait peur que ses patrons ne reconnaissent pas son honnêteté. Son travail était devenu pour lui une source d'inquiétude constante.

    Il se fit de plus en plus nerveux, de plus en plus préoccupé. Il essaya de faire comprendre à sa femme que son métier lui pesait et envisagea d'en changer, mais elle refusa de l'écouter. Il garda donc son emploi. Mais, avec le temps, il devint la victime de son imagination. Il eut d'abord un ulcère de l'estomac. Grâce à de bons soins et à un régime sévère, l'ulcère fut guéri et il reprit son travail, toujours debout à son pupitre. Un jour, il se dit que, s'il ne pouvait plus se tenir debout, il lui faudrait bien quitter cet emploi.

    Quelques semaines plus tard, un ulcère se déclara à son pied. Pendant quelques jours, il se rendit en boitant à son travail, et souffrit beaucoup, mais l'ulcère ne fit qu'empirer et il dut garder le lit. Loin de son bureau, bien tranquille chez lui, il guérit rapidement, et retourna de nouveau au travail. Mais son subconscient le harcelait sans cesse, le faisant raisonner,   sans  doute,  de  la  façon  suivante: « J'ai échappé à cet emploi horrible en ayant

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mal au pied, ils m'ont guéri trop vite, alors trouvons quelque chose de plus grave. »

    Quelques mois plus tard un nouvel ulcère apparut à la cheville. Il ne pouvait plus bouger le pied et on dut l'hospitaliser pour l'opérer. Après des semaines de convalescence, il retourna encore une fois à son bureau.

    Maintenant, la haine de son travail le minait. Bientôt un autre ulcère se déclara, entre la cheville et le genou, si grave, cette fois, qu'il fallut l'amputer. Alors, à la grande joie de cet homme son patron refusa de le reprendre, disant qu'il n'avait pas besoin d'un infirme chez lui, d'un homme toujours malade! À l'hôpital, les médecins avaient étudié et compris ce cas, aussi s'appliquèrent-ils à trouver à cet homme un emploi différent, pour lequel il avait montré beaucoup d'aptitude pendant son séjour; c'était une forme d'artisanat. Ce travail plut à notre ami et il réussit parfaitement. Maintenant, il n'avait plus peur  de  se  retrouver  en prison  pour une erreur de calcul, ni d'être accusé de vol, aussi sa santé s'améliora-t-elle et, à notre connaissance, il prospère dans sa nouvelle situation et il est très heureux.

    C'est un cas extrême, bien sûr, mais nous voyons tous les jours des hommes d'affaires harassés qui ont peur de la faillite, peur de leur patron, ou peur de «perdre la face», qui, eux aussi, cherchent un moyen d'évasion et ont des ulcères d'estomac, la maladie des p.d.g.î L'imagination peut faire s'écrouler un empire, mais aussi bâtir des empires. Si vous cul-

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tivez votre imagination, et si vous savez la contrôler, vous pourrez avoir tout ce que vous voulez. Il est impossible de donner des ordres à son imagination, parce qu'elle a bien des points communs avec la mule; on peut diriger une mule mais elle ne se laisse pas conduire de force; de même vous pouvez diriger votre imagination mais vous ne pouvez la conduire. Cela nécessite de la pratique, mais on y parvient.

    Alors, comment allez-vous vous y prendre pour contrôler votre imagination? C'est avant tout une question de foi, d'entraînement. Pensez à une situation quelconque qui fait naître en vous la peur ou le dégoût, et puis surmontez ces sentiments par la foi, en persuadant votre imagination que vous pouvez faire une chose.  Persuadez-vous  que vous  êtes  quelqu'un de spécial, un être à part, si vous voulez; peu importe votre méthode si vous parvenez  à  faire  travailler votre  imagination pour vous. Revenons à notre exemple de la rue à traverser; dites-vous que vous pouvez facilement marcher sur une planche  large d'un mètre posée en travers de la chaussée. Alors, grâce à la foi, en vous répétant que vous n'êtes pas comme les autres, que vous possédez un don spécial, vous réussirez à persuader votre imagination que vous  pouvez aisément traverser la rue sur cette planche bien qu'elle soit posée à vingt étages du sol. Ou alors dites-vous que vous êtes un singe plus ou moins stupide qui ne connaît pas le vertige et peut passer sur cette planche sans

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la moindre crainte. Qui a plus de valeur? Vous ou le singe ? Si un animal ou un idiot peuvent passer sur cette planche, alors vous, qui valez dix fois mieux qu'eux, le pouvez aussi. C'est uniquement une question d'entraînement, de foi. Pensez aux célèbres funambules, à Blondin qui a franchi sur un fil les chutes du Niagara. Blondin était un homme comme vous qui avait foi en ses possibilités, qui se croyait capable de faire ce qui était impossible à d'autres. Il savait que la seule chose à craindre était la peur d'avoir peur, il avait confiance en lui, il savait qu'il pouvait passer sur ce fil, même les yeux bandés. Nous  avons  tous  vécu ce  genre  d'expérience.   Nous   pouvons   monter   au   sommet d'une longue  échelle  et tant que nous ne regardons pas en bas nous n'avons pas peur. Mais dès que nous baissons les yeux sur le sol, nous pensons à la mort horrible qui serait la nôtre si nous tombions. Notre imagination nous montre notre chute, nous nous sentons tomber, nous nous voyons en sang, écrasé au sol; elle peut nous faire tenir les barreaux de l'échelle si fortement que nous ne pouvons plus  les   lâcher.  Les   couvreurs  eux-mêmes éprouvent parfois de ces peurs!

    Si vous contrôlez votre imagination en ayant foi en vous, en vos possibilités, alors vous pouvez faire n'importe quoi. Vous ne pourrez y parvenir en essayant de maîtriser votre imagination par la force; votre volonté ne pourra jamais vaincre votre imagination, elle provoquera au contraire des névroses.

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Rappelez-vous, une fois de plus, que vous devez guider votre imagination, la diriger et la contrôler. Si vous cherchez à la conduire par la force, vous échouerez. Si vous savez la guider, vous ferez toutes ces choses que vous aviez crues impossibles. Alors, avant tout, persuadez-vous que rien n'est impossible. L'impossible n'existe pas!

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